Cécile Babiole est une artiste active dès les années 80, dans le champ musical d’abord, puis dans les arts électroniques et numériques.
Cécile Babioleassocie dans ses créations arts visuels et sonores à travers des installations et des performances qui interrogent avec singularité et ironie les médias. Image, son et interactivité sont constitutifs de sa pratique. De dispositifs performatifs aux dispositifs impliquant le public, elle questionne de plus en plus les technologies et tente d’en transposer de façon détournée les usages normés dans le champ de la création. Les machines réelles ou virtuelles transparaissent en filigrane de l’ensemble de son travail : concerts de machines à coudre ou de moteurs, installations dans un bus ou dans une mine, fabrication numérique, encodage/décodage, Cécile Babiole s’approprie les registres de la machine et de l’algorithme pour en tirer une confrontation entre créativité et déterminisme, usages passés et présents, techniques obsolètes et contemporaines.
Ses derniers travaux s’intéressent au langage (écrit ou oral), à sa transmission, ses dysfonctionnements, sa lecture, sa traduction ou encore ses manipulations.
Copies Non Conformes est une installation. La phrase « Je ne dois pas copier » est installée au sol, imprimée en 3D puis scannée, et ré-imprimée en 3D jusqu’à ce que les lettres disparaissent sous les effets de la reproduction numérique, à l’image de la fatigue de la main d’un enfant qui rédige une punition scolaire.
L’installation Copies Non Conformesmet en scène l’érosion et les mutations à l’œuvre dans l’opération de reproduction de petites sculptures. Il s’agit des 17 caractères typographiques formant les mots : « JE NE DOIS PAS COPIER ». La formule s’inspire des punitions de mon enfance qui consistaient à faire recopier 100 fois et manuellement des phrases sentencieuses du type « Je ne dois pas bavarder en classe ».
Ici, ce n’est pas à la main que la phrase est recopiée, mais en utilisant un procédé de fabrication numérique : chacun des signes est modélisé et imprimé en 3D, puis l’objet résultant est numérisé grâce à un scanner 3D. Ce nouveau modèle est ré-imprimé, et, ainsi de suite, un certain nombre de fois en boucle. Chaque génération accentue la dérive des formes jusqu’à ce que les derniers objets reproduits soient devenus méconnaissables.
Sur le plan plastique, l’imprimante et le scanner sont détournés de leurs fonctions habituelles pour être transformés en véritables générateurs de formes impossibles à obtenir autrement : selon les opérations, il y a perte ou gain d’information, et donc distorsion des formes.
On peut interpréter cette pièce comme l’expression d’un des paradoxes de notre culture numérique : la reproductibilité infinie des informations s’accompagne d’une fragilité maximale des supports.